En cette fin d’été 2015, le soleil balaie de ses derniers rayons l’imposant donjon carré de 36 mètres de hauteur du château de Montaner édifié au XIVe siècle par le légendaire Gaston Fébus dans les Pyrénées Atlantiques.
Dans la cour intérieure, vaste enceinte circulaire de 52 mètres de diamètre, les membres de l’association « Le Tailloir » terminent les préparatifs du festin qu’ils s’apprêtent à servir.
La table en forme de u est dressée selon la coutume et, à 20h30, la soixantaine de convives qui ont acquitté leur obole franchissent le pont dormant et se présentent devant le pont-levis de la forteresse dont le fronton est incrusté de l’écusson des Foix-Béarn avec la devise « Febus me fe », proclamant ainsi aux yeux de tous que Fébus fit édifier ce puissant bastion.
Vêtus de leur costumes médiévales, les compagnons du « Tailloir » accueillent chaleureusement un à un chaque participant à ce dîner avec, comme premier cérémonial, l’immuable toilette des mains.
L’un des compagnons verse de l’eau parfumée sur celles-ci à l’aide d’une aiguière de cuivre au-dessus d’un bassin du même métal, puis un condisciple tend un linge blanc pour s’essuyer les menottes. Ensuite le maître de cérémonie prie les convives de passer à table, les bougies sont allumées, tous les participants reçoivent un couvre-chef, le ton est ainsi donné, les festivités peuvent alors commencer.
Tout d’abord, un verre d’hypocras est proposé à chaque hôte et, pendant sa dégustation, la présentation du menu comme la suite des réjouissances sont accompagnées agréablement en musique, chants, récits et contes anciens glanés sur les Chemins de Saint-Jacques de Compostelle par « La Compagnie des Musiciens Routiniers ».
Les recettes de ce menu du 20 août 2015 sont extraites d’un manuscrit anglais du XIVe siècle, intitulé « The Forme of Cury » et, pour cette occasion, les agapes comprennent cinq services : Chyches and Cheddar (pois chiches à l’ail et épices, ventrèche grillée et fromage) servi ci-dessous,
Egredouce (agneau, oignons, raisins de Corinthe, vin rouge et vinaigre), Rape (figues fraîches, pêches, raisins, vin rouge et épices), Gingerbread (miel, gingembre, poivre long et clous de girofle) et enfin le Boute-hors (dragée au sucre et grains d’anis) qui marque rituellement la fin du repas. Avec une cuillère comme unique couvert, chacun s’habitue bien vite à cette mode moyenâgeuse et cela contribue aussi aux commentaires, à la bonne humeur et à la convivialité qui règnent autour de la grande tablée d’autant que, durant tout le banquet, d’aimables échansons veillent généreusement au service d’un gouleyant vin rouge fort justement apprécié par tous les convives.
Au fil du dîner, l’amphitryon prodigue moult informations passionnantes sur la composition des mets, l’utilisation raisonnée des épices et des aromates, la manière toute particulière de consommer les plats, les codes du service au brancard et les préséances, etc. Ses propos étant imagés d’anecdotes historiques rendent ainsi ce délicieux banquet des plus plaisant pour l’esprit comme il l’est pour les papilles.
La nuit étoilée, la température clémente et l’ambiance guillerette incitent bientôt la joyeuse Compagnie des Musiciens Routiniers à entraîner en musique les plus hardis banqueteurs dans quelques gavottes, bransles, tourdions et autres gaillardes endiablés qui résonnent dans les épais murs de la forteresse comme la réminiscence de temps anciens par trop révolus.
Fort heureusement, grâce aux dynamiques membres du « Tailloir », à leur passion, leur érudition et leur dévouement à la cause médiévale, notre riche passé moyenâgeux ne sombre pas dans l’oubli, bien au contraire, grâce à cette soirée réussie à tous points de vue. Ces événements et leurs audiences tendent à démontrer que plus que jamais nous avons tous un grand besoin de renouer avec nos racines.
Alors, oyez, oyez, braves gens de France et de Navarre, gentes dames, preux chevaliers, damoiselles et damoiseaux, oubliez le temps d’une soirée vos smartphones, iPads et autres tablettes qui vous éloignent de tout le charme de la vraie convivialité et venez savourez un authentique moment d’évasion et de plaisir en partageant l’un des inoubliables dîners médiévaux du « Tailloir ».
Qu’on se le dise haut et fort, par monts et par vaux !
Reportage Philippe PLOQUIN et Françoise PEURIOT
Le Tailloir :
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La Compagnie des Musiciens Routiniers :
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